Echappée en Forêt-Noire


À quelques dizaines de kilomètres de Strasbourg, le land allemand du Bade-Wurtemberg déploie de grands espaces naturels ponctués de charmants villages aux traditions bien ancrées.

  • Pour visualiser la région , imaginez un livre ouvert : au milieu coulerait le Rhin, la page de gauche serait le massif français des Vosges. Sur la page de droite, un peu décalée vers le haut, figurerait la Forêt-Noire (Schwarzwald). Ce massif s’étend sur 200 kilomètres, en parallèle de l’Alsace, de Pforzheim à Bâle.
  •  Au nord, les routes serpentent entre les grandes étendues de hêtres, de sapins et surtout d’épicéas. À Bad Wildbad, un chemin surélevé et une tour d’observation en pente douce (Baumwipfelpfad) permettent de se prendre pour un oiseau. À 40 mètres de haut, les arbres se dévoilent depuis la cime et le regard porte jusqu’aux Alpes suisses.
  • Le centre de la Forêt-Noire est moins austère, cédant la place à des coteaux ensoleillés et à des prairies veillées par des fermes traditionnelles. La vigne s’épanouit notamment dans le Rebland, aux portes de Baden-Baden. Les exploitations, comme Weingut Schloss Neuweier, accueillent les visiteurs, curieux des vignes en terrasses et des déclinaisons du riesling ou du pinot noir.
  • Les hauts sommets et les lacs préalpins dominent la partie sud. Le Feldberg culmine à 1 493 mètres avec maints suiveurs à plus de 1000 mètres. Les vacanciers apprécient les rives du Schluchsee et du Titisee.

Coucous, gâteaux et pompons

Peu de régions allemandes possèdent des traditions aussi vivaces que la Forêt-Noire. Et on ne parle même pas de la série télévisée des années 1980, autour d’une fameuse « clinique » (à Glottertal, près de Fribourg-en-Brisgau).

  • Du chapeau à gros pompons rouges aux horloges à coucou, le folklore local a rendez-vous dans le musée de la Forêt-Noire, à Triberg. Aux intérieurs artisanaux succèdent une galerie des minéraux ou une collection d’orgues de barbarie. La passion des horloges à coucou est telle qu’une entreprise a créé le plus grand modèle du monde (6 tonnes) aux abords du village (Eble Uhren-Park).
  • Les marchés de Noël mettent en avant les spécialités locales en décembre. Les plus renommés se déroulent à Baden-Baden, Fribourg, Triberg ou Breitnau, sous le grand viaduc de Ravennaschlucht.
  • Et le fameux gâteau ? Eh bien, on n’y coupe pas ! pâtissiers et restaurateurs le déclinent à l’envie. Chacun s’inspire de la recette de 1915, mêlant une génoise au cacao imbibée de kirsch, des cerises au sirop et une généreuse crème chantilly.

Les bienfaits du thermalisme

Il existerait 350 stations thermales en Allemagne, dont une cinquantaine dans le land du Bade-Wurtemberg. Il suffit de repérer le mot Bad (« bain ») dans le nom de la localité. La sécurité sociale allemande ne prenant plus en charge les cures médicales, la plupart se sont reconverties dans le bien-être.

  • S’il ne fallait retenir qu’une station, ce serait forcément Baden-Baden. Quintessence du thermalisme avec ses sources à 68°C, elle existe depuis les Romains, voire les Celtes. Mais c’et au XIXe siècle qu’elle prend son essor, attirant artistes et têtes couronnées de toute l’Europe. Aujourd’hui encore, elle garde une aura internationale, d’autant que l’armée française y est resté jusqu’en 1999. Les salons du casino, le plus beau du monde, selon Marlène Dietrich, rutilent tels les grands appartements de Versailles, tandis que les spectacles se succèdent dans le plus grand opéra du pays. Côté bains, les moins prudes optent pour la pompe du Friedrichsbad avec sa coupole néo-Renaissance et son parcours en 17 étapes. Ceux qui préfèrent garder le maillot se dirigent vers les thermes modernes de Caracalla.
  • À 40 kilomètres à l’est, Bad Wildbad est le parfait exemple d’une station qui a s’adapter. Le Palais thermal, mêlant depuis 1897 décoration mauresque et Art nouveau, intègre désormais un bassin chaud à ciel ouvert et un sauna avec vue panoramique sur la montagne. Pour le plus grand plaisir des locaux et des Français frontaliers !

Des cités de caractère

Comme en Alsace, les petites villes et les villages ont gardé leur charme médiéval, alternant pignons, colombages et façades colorées au fil des rues. Les placettes se parent de fontaines, de mairies cossues, de temples ou d’églises, tandis que les terrasses des biergaten et des weinstuben désaltèrent les amateurs de bière ou de vin.

  • Fribourg-en-Brisgau ( Freiburg im Breigsgau) revendique le titre de la capitale de la Forêt-Noire et de cité grâce à son quartier vert. Abîmée pendant la guerre, la vieille ville a néanmoins gardé son cachet. La tour de 116 mètres de la cathédrale est un immanquable point de repère tandis que l’on flâne le long des rues. La plupart sont décorées de galets du Rhin et bordées par les bächle. Dans ces rigoles de pierre coule une eau pure : elle fait la joie des enfants qui y traînent de petits bateaux et le malheur des étourdis.
  • Il serait vain de citer tous les beaux villages tels Gengenbach, Gernsbach ou Triberg. Ce dernier se distingue en abritant les plus hautes cascades allemandes et de nombreuses possibilités de randonnées;

Les musées de Stuttgart

La capitale régionale est une bonne porte d’entrée vers la Forêt-Noire. Très bombardée, la ville n’a d’intérêt que par ses collections muséales.

  • Mercedes-Benz ou Porsche ? Ces fleurons automobiles ont créé des musées design. Côté Mercedes, le long de paliers en spirale se déploient les ancêtres, une voiture à portière papillon, des bolides ou une papamobile. Côté Porsche, on passe de la classique 911 à la 917 de course, sans oublier la fameuse Coccinelle.
  • L’art fait bonne figure avec la galerie nationale d’Art qui présente une large palette, de Hans Holbein à Paul Cézanne ou Jeff Koons. Le musée des Beaux-Arts complète avec les expressionnistes allemands, en particulier Otto Dix.

L’éclat du baroque

Bien érudit qui pourrait s’y retrouver parmi les ducs de Wurtemberg ou les margraves de Bade…mais ces maisons souveraines ont couvert, au XVIIIe siècle, leurs principautés de somptueux palais.

  • À Ludwigsbourg, dans la banlieue de Stuttgart, deux corps de logis reliés par des galeries forment une impressionnante cour. Deux chapelles, un théâtre, de ravissants petits cabinets et des stucs à perte de vue complètent le décor.
  • À Rastatt, près de Baden-Baden, plus qu’au palais principal, on s’arrête dans la résidence de la Favorite, plus raffinée. Les sols de scagliola imitent le marbre tandis que les murs sont recouverts de milliers de carreaux de faïence?
  • Couvents et abbayes ne sont pas en reste. À Sankt-Peter, près de Fridbourg, le faste de l’église rivalise avec les ornements de la bibliothèque. Non loin, à Sankt-Blasien, l’immense dôme est le troisième plus large d’Europe après Saint-Pierre de Rome et les Invalides.